Article 6 : Sous un pont, une école.

New Delhi, août. Entre deux piliers de béton, sous le grondement régulier du métro aérien, des dizaines d’enfants sont assis par terre, un cahier posé devant eux. C’est ici, au coeur d’un quartier pauvre de la capitale indienne, que Rajesh Kumar Sharma a créé, il y a plus de dix ans, une école pas comme les autres.

L’idée lui est venue en 2006, lorsqu’il a vu, sur un chantier, des enfants d’ouvriers livrés à eux-mêmes, loin de toute salle de classe. Il a commencé par les aider sous un arbre, puis, en 2010, il a installé cette école improvisée sous un pont, à l’abri de la pluie et du soleil.
Aujourd’hui, plus de 200 enfants issus des bidonvilles voisins viennent y apprendre chaque jour : les garçons le matin, les filles l’après-midi. Les niveaux vont de la première année de primaire à la troisième année du secondaire. Beaucoup sont scolarisés officiellement mais viennent ici pour comprendre ce qu’ils n’ont pas assimilé en classe. D’autres, faute de papiers ou de moyens, ne fréquentent que cette école.

Pas de murs, pas de bancs. Les tableaux sont peints à même les piliers. Les enseignants sont bénévoles, les ressources viennent uniquement de dons, et l’engagement de Rajesh est la seule constante. Pour lui, l’éducation est la clé pour briser le cycle de la pauvreté.

La visite d’Ammala

C’est dans ce décor brut mais vibrant que Maurin et Maylan se sont rendus lors de leur passage à New Delhi, avec l’association Ammala. Maurin connaissait déjà ce lieu unique : à 19 ans, il avait été mis en contact avec l’Inde par un ami français, dont la mère avait lancé plusieurs petites ONG, dont celle-ci, en collaboration avec Sharma.

Ce jour-là, la mission d’Ammala était simple mais essentielle : offrir un petit-déjeuner aux 170 enfants présents et leur distribuer des brosses à dents et du dentifrice. Un geste concret pour répondre à des besoins immédiats, tout en s’inscrivant dans une vision plus large : soutenir ceux qui, comme Rajesh, œuvrent chaque jour pour que l’éducation ne soit pas un privilège réservé aux plus riches.

Sous les ponts, l’énergie est débordante mais l’organisation parfois chaotique. Difficile, pour les bénévoles sur place, d’exprimer clairement leurs besoins. Pourtant, c’est précisément ce genre de petites associations que Maurin affectionne : celles qui font beaucoup avec très peu, et où chaque geste compte.

Même si cette fois, Ammala n’a pas pu aller plus loin qu’un petit-déjeuner et quelques kits d’hygiène, un lien est maintenu avec l’école pour voir comment l’aider davantage à l’avenir. “Observer comment les enfants étudient dans ces conditions et voir Karma, notre coordinateur local au Ladakh, à l’oeuvre, c’est inspirant. Ça m’aide à comprendre, à avancer, et à mesurer la force de ces initiatives”, confie Maurin.

Plus qu’une école

Ce lieu n’est pas seulement un espace d’apprentissage. C’est un symbole de résilience et d’ingéniosité. Transformer un espace inutilisé et bruyant en refuge éducatif est un acte fort. Et voir, au milieu de ce béton, ces enfants concentrés sur leurs cahiers rappelle que le savoir peut s’épanouir partout… pourvu qu’on lui laisse une place.

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